« Le sport ne fait pas suffisamment savoir quel rôle et quelle force il peut avoir »
Propos recueillis par Julian JAPPERT
Éducateur, entraîneur, sélectionneur de l’Équipe de France, directeur technique national, conseiller sportif, consultant… Gérard Houllier connaît le sport et le football mieux que quiconque. Nouveau membre d’honneur de notre Think tank, il revient sur sa vision du sport et ce qu’il représente aujourd’hui pour notre société.
Sport et Citoyenneté a vocation à étudier l’impact du sport sur la société. Quel est votre sentiment sur ce que le sport représente aujourd’hui dans notre pays ?
GH : Le sport, c’est avant 17 millions de licenciés et des millions de bénévoles en France. C’est une force sociale énorme qui, à mon avis, est sous-estimée car elle n’est pas contestataire, revendicatrice. Son impact est bien moindre par rapport à celui de la culture par exemple. Il ne s’agit pas d’opposer l’un à l’autre, il s’agit juste ne pas résumer le sport à son aspect médiatique. D’ailleurs, un autre volet est essentiel à mes yeux, c’est le lien entre le sport et la santé, qui commence à être reconnu et qu’il faut davantage valoriser. Enfin, le sport renforce les liens sociaux et les rouages de nos sociétés. Le fait de respecter l’autre, de partager, d’échanger, la générosité, dans l’effort comme dans les rapports humains… Je pense que dans ce domaine le sport ne fait pas suffisamment savoir quel rôle et quelle force il peut avoir.
Pour quelles raisons avez-vous souhaité vous investir dans Sport et Citoyenneté ?
GH : Nous sommes dans une société très individualiste, mais je pense que les jeunes ont besoin de plus d’affection que l’on ne le croit. Ils ont besoin de prendre des responsabilités, de s’investir. Ils en savent beaucoup plus que nous à leur âge, ils sont beaucoup plus ouverts et réagissent bien mieux que nous à certaines notions. En même temps, ils ont besoin d’estime, d’affection, de compréhension et de respect. C’est ça qui les fait marcher et je pense que le sport peut aider à ce niveau.
Vous avez entraîné le FC Liverpool pendant 6 ans. C’est un club très investi dans sa communauté, avec une politique de Charity très importante. Pensez-vous que les clubs professionnels ont une sorte de responsabilité sociale/sociétale, et qu’ils se doivent de participer à la vie de leur territoire ?
GH : La situation est assez particulière en Angleterre. Les clubs sont souvent très ancrés dans leur ville, voire dans leur quartier. La notion de communauté est forte. Par exemple, les joueurs vont régulièrement dans les écoles ou dans les milieux plus défavorisés pour animer des séances, rencontrer les gens, etc. Ils marquent leur présence, et les clubs considèrent qu’ils ont une vraie responsabilité à ce niveau. Cela fait partie de la culture anglaise et c’est vrai que je l’ai ressentie de manière très forte à Liverpool. J’assiste d’ailleurs encore à des évènements mis sur pieds par la Liverpool Foundation. Cela arrive petit à petit en France, et sur ce point l’Olympique Lyonnais est d’ailleurs un club précurseur, avec une OL Fondation très dynamique.