Le statut des footballeurs professionnels : un accord historique en Europe
19 juin 2012
Benjamin Dusaussoy
Journaliste à Bruxelles, spécialiste des questions institutionnelles
Réflexion proposée dans le cadre des travaux sur le dialogue social dans le sport
Les divers partenaires sociaux du secteur du football professionnel – la FIFPro (syndicat des joueurs), l’EPFL (Association des ligues européennes de football professionnel), l’ECA (Association européenne des clubs) et l’UEFA (organe directeur du football européen) – ont conclu le 19 avril dernier à Bruxelles, un accord historique afin d’assurer des standards minimum applicables pour les contrats de joueurs au sein de l’Union européenne. Cet accord, le premier pour un sport d’équipe au niveau européen, s’appliquera plus largement à l’ensemble des 53 pays membres de l’UEFA.
« Il y a des joueurs qui gagnent beaucoup d’argent comme Ronaldo, Messi ou Ribéry. Mais il y a aussi de nombreux joueurs en Europe qui font face à des difficultés. Je remercie la famille du football pour avoir trouvé des solutions à ces problèmes » a déclaré Karl-Heinz Rummenigge, Président de l’Association européenne des clubs.
En 1995, l’arrêt Bosman avait largement bouleversé le paysage du football européen. La jurisprudence communautaire abolissait pour les clubs, les quotas de joueurs par nationalité ressortissants de l’UE. Depuis cette date clé de l’histoire du football européen et la libéralisation du marché des transferts, le nombre de mouvement de joueurs n’a cessé d’augmenter. Alors que le mercato estival vient d’ouvrir ses portes, nombreux sont ceux qui n’auront pas la chance de bénéficier des prestigieux contrats des principaux championnats européens. Il était donc devenu indispensable de travailler sur l’uniformisation législative du football à l’échelle européenne.
Déterminer les droits et les devoirs des clubs et des joueurs
Après quatre années de négociations sous l’égide de la Commission européenne, les différents partenaires représentés par Michel Platini, Président de l’UEFA, Frédéric Thiriez, Vice-président délégué de l’EPFL, Karl Heinz Rummenigge, Président de l’ECA et Philippe Piat, Président de la FIFpro, ont signé conjointement cet accord. Le but étant d’assurer que les contrats des joueurs respectent les exigences sociales minimales. Les contrats devront être réalisés par écrit et définiront les droits et les devoirs des clubs tout comme ceux des joueurs. Ils traiteront de questions relatives au salaire, à l’assurance maladie, aux cotisations sociales ou encore aux congés payés. Les contrats se référeront également aux devoirs des joueurs, à savoir : participer aux entraînements, conserver une hygiène de vie saine ou se conformer aux procédures disciplinaires en vigueur. Ils contiendront enfin des dispositions relatives à la résolution des litiges et à la législation applicable.
« Ces dispositions existent déjà dans plusieurs pays européens » comme l’affirme Jonathan Todd, le porte-parole du Commissaire László Andor, chargé de l’Emploi, des Affaires sociales et de l’Inclusion. Elles ne concernent donc pas les pays les plus avancés dans ce domaine. Mais il semble essentiel d’étendre ces standards à l’ensemble des 53 pays du territoire de l’UEFA, en Europe de l’Est notamment. Cet accord représente une première étape pour offrir des garanties à tous les joueurs, particulièrement aux jeunes : « L’accord contient des dispositions relatives à la protection des jeunes joueurs obligeant les clubs à respecter la protection des jeunes au travail et d’assurer que chaque jeune joueur impliqué dans son programme de développement ait le droit de suivre l’éducation scolaire obligatoire en accord avec la loi nationale et qu’aucun d’entre eux ne soit empêcher de poursuivre cette éducation non footballistique. »
Le rôle de facilitateur de la Commission
Si la Commission respecte l’autonomie du sport, reconnu comme tel dans le Traité de Lisbonne, elle n’en a pas moins joué un rôle décisif dans l’établissement de cet accord. « La Commission facilite le dialogue au niveau interprofessionnel et sectoriel des partenaires sociaux tout en respectant leur autonomie. L’accord est le résultat de négociations poussées depuis l’établissement du Comité de dialogue social sectoriel en 2008. » C’est par le biais de ce Comité que la Commission a rassemblé les organisations représentatives des employeurs et des employés afin de trouver des solutions sur l’emploi et les conditions sociales. L’Institution européenne continuera de supporter les partenaires sociaux dans le suivi et la mise en place du processus. L’accord doit être appliqué pour l’ensemble des pays, au plus tard, trois ans après sa date de signature. Les partenaires sociaux se sont engagés eux-mêmes à mettre en place les termes de cet accord en utilisant les instruments légaux appropriés, comme déterminé au niveau national dans l’Union européenne et dans les autres pays de L’UEFA. Est-il possible d’imaginer l’élargissement de pareil accord à d’autres disciplines ? « La Commission est en train de préparer une phase test afin d’établir un Comité de dialogue social sectoriel dans le domaine du sport et des activités de loisirs. Cela étant, le Comité n’a pas encore été créé. » Il n’est donc pas encore envisageable que l’accord puisse être négocié et adapté à d’autres sports, à court ou moyen terme.