Penser le tourisme de demain :
le tourisme sportif peut-il être un levier d’un tourisme durable ?

Par Eva JACOMET, chargée de projets du Think Tank Sport et Citoyenneté

Selon une étude conduite en 2022 par l’Union Sport & Cycle pour le compte du Conseil National des Villes Actives et Sportives, le sport et les activités physiques et sportives s’inscrivent de plus en plus dans le quotidien des vacances des Français puisqu’environ 75% d’entre eux déclarent qu’ils apprécient avoir des lieux de pratique à proximité, et pour 17% d’entre eux c’est même indispensable. Le tourisme sportif représente donc un réel enjeu de demain pour les territoires et collectivités autant qu’il offre un horizon potentiel pour réduire l’impact du tourisme sur l’environnement, en mettant, par exemple, en avant les mobilités actives ou en jouant le rôle d’agent de sensibilisation à la protection de l’environnement.

Limiter l’impact des activités touristiques et sportives sur l’environnement

Les activités sportives et le tourisme sportif ont un impact réel sur l’environnement et peuvent représenter une menace envers les espaces et ressources naturels. Jean-Marie Breton, Professeur de l’Université des Antilles et de la Guyane, soulignait dans une étude de cas sur les liens entre sport et environnement en Guadeloupe au sujet des activités sportives que « les phénomènes de sur fréquentation, et les suréquipements qu’ils suscitent, sont à l’origine d’atteintes directes à l’environnement, notamment à l’intégrité et à l’esthétique des paysages et à l’équilibre comme à la préservation des écosystèmes. S’y ajoutent des comportements individuels et collectifs générateurs de pollutions et de dégradations qui ont pour effets d’aggraver les atteintes aux milieux naturels et à la biodiversité »[1].

Faire du tourisme sportif un levier d’un tourisme plus vert et durable demain implique en premier lieu de questionner l’empreinte écologique de telles activités. Veiller à des infrastructures sportives respectueuses des écosystèmes et ne renforçant pas l’artificialisation des sols ou sensibiliser les visiteurs aux gestes éco-responsables et au bon usage du matériel éventuellement utilisé peuvent contribuer à limiter l’impact de ces activités, voire même à en faire des vecteurs de sensibilisation à la préservation de l’environnement.

Sensibiliser à la protection de l’environnement

Parce qu’il véhicule des valeurs d’éducation, le sport peut et doit jouer un rôle de sensibilisation et de changement des comportements. Il est en question pour la protection de l’environnement et de ses différentes dimensions : lutte contre le changement climatique, réduction des pollutions, sensibilisation à l’environnement, protection de la biodiversité, etc. Il peut être un vecteur de changement des comportements sociétaux, fournir des exemples de bonnes pratiques transposables dans d’autres contextes. Par conséquent, l’organisation d’activités sportives et physiques dans le contexte des ressources naturelles peut contribuer à sensibiliser les habitants de la région et les touristes à la nécessité de préserver ces ressources contre le changement climatique.

Adopter des modes de déplacement doux et actifs

Les déplacements en transports vers les lieux de vacances représentent aujourd’hui 77% des émissions de gaz à effet de serre du tourisme en France. Décarboner cet acheminement vers les lieux de tourisme apparaît comme une priorité. Ici encore, le développement du tourisme sportif et la promotion des modes de déplacement actifs à pied ou à vélo notamment, ont un rôle à jouer. On notera, à cet égard, l’intérêt croissant en France et en Europe pour l’itinérance. Selon l’étude produite par l’Union Cycle & Sport mentionnée ci-dessus, 14% des français déclarent vouloir faire un séjour sportif en itinérance, en vélo ou à pied. Ils sont déjà 10% à choisir ce mode de tourisme. Nombreux sont les leviers à activer pour encourager et soutenir ces dynamiques : poursuivre le développement des itinéraires touristiques proposant des déplacements pédestres, à vélo ou en kayak par exemple, investir dans la création ou l’entretien des infrastructures adaptées, promotion des voyages itinérants ou mesures incitatives (réductions sur des forfaits touristiques, hébergements etc).

Le changement climatique force à imaginer une nouvelle donne en matière touristique. A cet égard, l’essor du tourisme sportif préfigure de nouvelles manières de faire du tourisme, à condition de veiller à son empreinte environnementale et faire du sport un vecteur de sensibilisation à la préservation des environnements.

[1] Breton, Jean-Marie. « Sport, tourisme, environnement et développement local durable (activités récréatives et sportives et protection de l’environnement : le cas du Parc national de la Guadeloupe) », Revue juridique de l’environnement, vol. 35, no. 2, 2010, pp. 219-230.

Pour aller plus loin

« 4% seulement de nos déplacements quotidiens s’effectuent à vélo », Interview de Karine Bozzacchi, Responsable RSE du Tour de France

« L’écologie est l’objectif commun à atteindre dans le monde du sport », Interview d’Yves Pellicier, président de MAIF

Quand te reverrais-je, pays enneigé ? Par Alice Buensoz, chargée de mission Think tank Sport et Citoyenneté