L’inclusion par le sport des populations déplacées : échanger pour innover
par Sylvain Landa, Directeur éditorial du Think tank Sport et Citoyenneté
A l’occasion de la journée de l’Europe 2023 mardi 9 mai, Sport et Citoyenneté, Play International et l’ANESTAPS organisent une journée d’ateliers, d’échanges et de rencontre pour renforcer la coopération intersectorielle en matière de sport et de migration, en faisant des jeunes citoyens les acteurs du changement !
50% des Français affirment ne pas faire confiance à l’Union européenne. Un euroscepticisme qui est souvent le fruit d’une mauvaise appréhension des enjeux européens. Dans un contexte international troublé, où notre continent est exposé à une crise multisectorielle (diplomatique, environnementale, financière, politique), les bouleversements géopolitiques liés au conflit en Ukraine nous invitent à réinterroger le sentiment européen, notamment chez les jeunes générations. Quelles sont les valeurs qui nous rassemblent ? Alors que les flux des personnes déplacées fuyant les conflits, les effets du dérèglement climatique ou des crises économiques s’intensifient (et s’intensifieront dans les années à venir), quels sont les leviers qui peuvent nous permettre de favoriser la rencontre et le dialogue ? Comme le souligne Jacques Delors, ancien président de la Commission européenne, « apprendre à vivre ensemble c’est apprendre [de nos] différences, vivre avec elles et s’en enrichir ». Quel meilleur exemple que le sport pour illustrer cela ?
Dans ses conclusions du 23 novembre 2015, le Conseil de l’Union européenne a souligné le rôle de la politique de la jeunesse et de l’animation socio-éducative auprès des jeunes dans le contexte de la migration. Les ministres européens ont notamment souligné qu’il importait de renforcer la coopération intersectorielle, en particulier dans les domaines de l’éducation, de la jeunesse, de la culture et du sport.
L’inclusion sociale par le sport fait partie des priorités poursuivies par l’Union européenne dans le champ du sport. Le plan de travail pour le sport 2021-2024 y fait référence. Parce qu’il rapproche les gens et permet de créer des communautés, le sport peut contribuer à l’accueil et à l’inclusion des publics déplacés. Plusieurs ressources l’attestent, et des bonnes pratiques démontrent les effets positifs de ce type de projet. Mais le sport n’est pas un outil magique ; il n’est qu’un moyen pour atteindre la finalité de l’inclusion. Comme le souligne François le Yondre[1], quand on parle d’inclusion par le sport, on distingue souvent trois approches. La première consiste à envisager le sport non pas à travers son utilité mais simplement pour ce qu’il est, une activité culturelle qu’il s’agit de rendre accessible à tous. La deuxième s’appuie sur le caractère attractif du sport pour engager une relation favorable à un accompagnement social plus profond. Enfin, la dernière consiste à voir le sport comme un outil de transformation de l’individu ou de sa situation (travail sur l’estime de soi, lutter contre la dépendance, favoriser l’accès à l’emploi…). Choisir telle ou telle approche nécessite de réfléchir au projet de vie des personnes accueillies et renvoie à la conceptualisation même des programmes d’inclusion par le sport. Les bonnes volontés existent, les ressources pour accompagner à l’ingénierie et au développement de programmes d’inclusion commencent à être visibles, à l’image du programme de formation en ligne FIRE développé par l’ESSCA et notre Think tank à destination des clubs de football amateurs. L’enjeu est aujourd’hui de recenser et de valoriser les initiatives, de les faire connaître et de favoriser les synergies entre les acteurs, à tous les niveaux : l’échelon local, en connectant les espaces de vie où la pratique d’activités physiques ou sportives et le lien social peuvent se nouer (clubs sportifs, centres de loisirs, centres sociaux, associations, écoles…) ; l’échelle nationale, à travers un pilotage et une structuration des réseaux et des acteurs associatifs impliqués ; et, enfin, l’espace européen, à travers une reconnaissance politique du sujet dans les documents régissant l’accueil et l’inclusion des publics déplacés.
L’enjeu est aussi de libérer les idées et d’engager la jeunesse européenne dans ce défi, afin de montrer que l’outil « sport » peut répondre à des enjeux sociétaux non résolus. Le 9 mai, nous réunirons des dizaines de jeunes mais aussi des experts et des décideurs, pour formuler des idées et des recommandations sur ces sujets. Rejoignez-nous dans cette aventure !
Journée « Sport, Europe, Réfugiés : un challenge pour la jeunesse européenne ! »
- Un Serious Game « Sport, Europe et Migrations » (10h00-12h00) et (14h30-16h30) construit avec les équipes de Play International et de l’ANESTAPS à destination de 90 jeunes (français ou exilés francophones), qui suivront 8 ateliers tout au long de la journée pour explorer la dimension européenne du sport et formuler des propositions afin de renforcer l’accueil et l’inclusion des publics déplacés par le sport.
- Un tournoi de foot solidaire (12h00-14h00), réunissant jeunes français et jeunes déplacés et plusieurs sportifs de haut niveau (dont l’ancien footballeur et sélectionneur ukrainien Andreï Chevtchenko, aujourd’hui fortement engagé sur les conséquences du conflit en Ukraine)
- Deux conférences-débat (17h00-20h00) pour réagir aux propositions des jeunes et interroger la mobilisation du sport et des valeurs européennes.
Accès libre. Inscription obligatoire.
[1] Maître de conférences à l’UFR APS de l’Université de Rennes 2. Chercheur en sociologie du sport. Directeur adjoint du VIP&S2, Membre du Comité Scientifique du Think tank Sport et Citoyenneté.
Pour aller plus loin
Le sport en tant qu’outil d’inclusion des jeunes migrants doit être inscrit noir sur blanc à l’agenda de l’UE par Sophie Lopez, chargée de mission affaires européennes
https://footballwithrefugees.eu/ Le site du projet FIRE+ « Football Including Refugees » conduit par Sport et Citoyenneté avec 7 partenaires européens