Paris 2024, et après ?

06/09/2024 – Tribune

Alors que le rideau se referme sur Paris 2024, il est tentant de ne s’arrêter qu’au nombre de médailles remportées. Cependant, l’enjeu véritable dépasse les performances sportives tant individuelles que collectives. L’essence-même des Jeux réside dans ce qu’ils laissent derrière eux, dans cet héritage qui doit continuer à inspirer la société tout entière. Pour que cette grande fête sportive se perpétue, il est crucial que les athlètes ne soient pas les seuls à profiter des bienfaits du sport, mais bien l’ensemble de la société.

L’héritage des Jeux ne se limite pas aux infrastructures édifiées pour l’occasion, comme les stades ou les villages olympiques. Il englobe également des dimensions immatérielles telles que la promotion des valeurs de l’olympisme, le développement de la pratique sportive et l’amélioration de la cohésion sociale. La Fondation LA84, créée après les Jeux Olympiques de Los Angeles en 1984, a ainsi permis à plus de 4 millions de jeunes de pratiquer du sport grâce à un report de financement et une volonté d’en faire profiter la ville et ses citoyens, illustrant ainsi la capacité des Jeux à générer un impact durable.

Les valeurs de l’olympisme incluent le vivre-ensemble, l’apprentissage de la connaissance mutuelle, l’idéalisme et la capacité à dépasser les clivages et les appréhensions. Paris 2024 ne doit pas faire exception.

En contribuant à changer le regard sur le handicap, les Jeux Paralympiques prennent tout leur sens pour faire évoluer la société. En France, les personnes en situation de handicap se heurtent encore à de nombreuses difficultés pour accéder à la pratique sportive : environ 46 % ne pratiquent pas une activité physique alors que 90 % y voient un intérêt.

Si les Jeux Paralympiques permettent de susciter une prise de conscience et une admiration pour ces athlètes hors du commun, il est crucial que cet élan se traduise par un accès élargi et facilité au sport pour tous, et en particulier pour les femmes : améliorer l’accessibilité et la concevoir quand elle est absente ; développer la pratique sportive pendant les temps scolaires et périscolaires ; permettre la découverte pour les futurs pratiquants et leur entourage ; financer et soutenir la mise en place de matériel et de temps humain pour accompagner les pratiquants.

Demain, il faudra pouvoir analyser ces actions mises en place pour mieux les dupliquer à l’échelle du pays et les améliorer.

Loin des podiums et des bilans économiques, l’impact sociétal du sport reste un pilier souvent négligé. Pour que le sport joue pleinement son rôle dans l’éducation, l’inclusion et la cohésion, il est indispensable de mesurer l’efficacité des initiatives mises en place. De tels outils existent, développés notamment par le Think tank Sport et Citoyenneté.

Garantir la durabilité des projets passe par la démonstration tangible de leur impact. Sans cela, ces initiatives risquent de perdre leur financement ou le soutien politique nécessaire.

Pour que l’héritage des Jeux ne se limite pas aux infrastructures, mais devienne un véritable levier social, il est crucial de pouvoir lui assurer un financement adéquat. Sport et Citoyenneté défend l’idée que cet héritage doit être soutenu par un engagement financier fort, à hauteur de 1 % du budget de l’État, avec la mise en œuvre d’une politique interministérielle coordonnée autour du sport.

Cet engagement financier devrait se faire après une évaluation et une rationalisation des besoins et donc des couts, avec une structuration forte de la gouvernance pour éviter les doublons.

Au-delà du fonds de dotation spécifique dédié à l’héritage des Jeux, cet engagement pourrait être structuré non seulement autour du soutien des pouvoirs publics, mais également par celui des partenaires privés, le cas échéant encouragés par une mesure d’incitation fiscale. Un tel investissement global permettrait de pérenniser les initiatives nées des Jeux, assurant ainsi leur impact durable sur l’éducation, la santé et la cohésion sociale.

Les bénéfices seraient multiples : une population en meilleure santé, une réduction des maladies chroniques, des risques cardiovasculaires et des cancers (première cause de décès en France, en constante augmentation), et, plus généralement, des citoyens plus heureux, tolérants et respectueux. En finançant ces actions, on favoriserait la sensibilisation aux grands enjeux sociétaux, qu’il s’agisse de la lutte contre les discriminations, de la prévention des violences sexuelles ou encore de la protection de l’environnement. Cet investissement dans le sport est donc bien plus qu’une dépense, c’est un pari sur un avenir plus juste et plus sain.

 

Didier Poulmaire, Président, et Julian Jappert, Directeur général du Think tank Sport et Citoyenneté.

 

Cette tribune a également bénéficié d’une republication dans Les Échos.





Sport et citoyenneté