Le financement durable du sport
S’il est difficile de définir un « modèle européen du sport » uniforme, compte tenu des spécificités de chaque pays, certains principes permettent néanmoins de le caractériser. Sa structure pyramidale, où le sommet (haut niveau et sport professionnel) et la base (sport de masse) sont solidaires l’un de l’autre constitue le trait le plus marquant.
Or, plusieurs études européennes[1] et la situation politique et économique actuelle du Vieux continent, laissent à penser à une fragilisation de ce modèle.
Les structures de financement du sport sont assez similaires en Europe, et se répartissent, schématiquement, autour des dépenses sportives des ménages, de l’investissement des collectivités territoriales, des entreprises et de l’État.
En France, chaque source a une ou plusieurs destinations privilégiées : les financements privés sont majoritairement orientés vers le haut niveau et le sport professionnel, avec une concentration des financements sur les disciplines les plus médiatisées. Dans ce contexte, le football fait figure de privilégié, même si cela doit être fortement nuancé compte tenu du poids économique du Paris Saint-Germain et de l’absence d’harmonisation européenne (fiscale, sociale), qui met à mal la compétitivité du football français[2].
Le financement de l’État est lui aussi fortement orienté vers le haut niveau, même si la correction des inégalités d’accès à la pratique (en direction des publics les plus éloignés ou des territoires carencés) et la promotion de l’activité physique pour tous deviennent de nouvelles priorités. Or, dans le même temps, les financements destinés à la base de la pyramide se raréfient. La pratique quotidienne repose en effet en très grande partie sur le bénévolat, l’engagement des collectivités territoriales et les dépenses des ménages. Le premier se raréfie et souffre dans son renouvellement. Les collectivités territoriales subissent elles les conséquences de la réduction des dotations de l’État et d’un taux d’endettement élevé, ce qui limite leurs financements. Ces derniers étant principalement orientés vers la construction, la rénovation et la gestion des équipements sportifs ainsi que le soutien aux clubs, cela impacte forcément la pratique sportive de masse. Enfin, les ménages subissent toujours les effets de la crise économique, ce qui amoindrit leur consommation de biens et de services sportifs.
Quelles sont alors les pistes de solution envisagées pour sécuriser le financement du sport ? Au niveau du sport professionnel, la régulation économique entreprise ces dernières années par l’UEFA (fair-play financier) doit encore se consolider, et l’appui des institutions européennes est ici recherché. Quant au sport de masse, le développement de ses propres sources de financement est régulièrement évoqué. L’essor des pratiques sportives de loisirs, l’intérêt de nouveaux publics (femmes, seniors, familles), le développement des offres sport/santé… sont autant de pistes possibles. Les entreprises ont aussi un rôle à jouer, notamment dans le cadre du développement des politiques de RSE. Enfin, le financement public du sport va nécessairement évoluer en raison des contraintes budgétaires et du processus de réforme territoriale en cours. La mise en cohérence des politiques publiques, la rationalisation des investissements (notamment au niveau des équipements de proximité) et une gouvernance territorialisée du sport (à laquelle les collectivités seraient associées) semble souhaitables. Surtout, les systèmes de solidarités entre la base et le sommet de la pyramide doivent être confortés et pérennisés. Le rapport rendu par les députés français Régis Juanico et Guenhaël Huet en 2013[3] énonce plusieurs pistes de réflexion. Il paraît en effet urgent de garantir ces solidarités, si emblématiques du modèle
[1] Etude sur le financement public et privé du sport en Europe (2008) ; Étude sur le financement du sport pour tous en Europe (2011) ; Étude sur le renforcement des mécanismes de solidarité financière dans le sport.
[2] Baromètre des impacts économiques et sociaux du football professionnel, EY et UCPF, 3e édition, 2014.
[3] Rapport d’information sur la politique de soutien au sport professionnel et les solidarités avec le sport amateur, 11 juillet 2014
Cet article est a retrouver dans notre revue 31: le financement durable du sport