La mixité des pratiques passe aussi par celle de l’encadrement
Longtemps pensée par les hommes et pour les hommes, la pratique sportive est parvenue à se féminiser avec le temps. En sera-t-il pareil pour l’encadrement sportif ?
Par Frédéric Delannoy, Directeur technique national, Fédération Française du Sport d’Entreprise
Dans le sport comme dans beaucoup d’autres domaines, l’exemplarité des responsables favorise le développement de la masse. En clair, plus les femmes occuperont de fonctions de responsabilités dans le sport, plus on en trouvera sur les terrains car ceux-ci seront aussi pensés pour elles.
Cette question avait ainsi beaucoup mobilisé le ministère des Sports au début du XXIe siècle, dans le sillage des équipes féminines de football qui tentaient de pouvoir utiliser des terrains souvent réservés aux hommes. Différentes actions ont été entreprises pour modifier la tendance dominante : les quotas favorisant la mixité dans les équipes d’élus, des initiatives pour développer le nombre de directrices techniques nationales dans les fédérations et l’encadrement technique dépendant de l’État, entre autres. Étonnamment, aucune mesure, peu d’incitations ont été déployées pour féminiser l’encadrement et l’emploi dans le sport. Pourtant, la question du genre dans l’emploi sportif a gagné une certaine vigueur avec la révélation des différents scandales liés aux violences sexuelles dans le sport, souvent, elles aussi, genrées. Les femmes ne représentent ainsi que 34% des titulaires des diplômes d’encadrement sportif délivrés par le ministère chargé des Sports. La tendance est la même en STAPS, où elles ne représentent que 20% des étudiant.e.s en filière entraînement, contre 45% en filière activités physiques adaptées. Si l’on considère que la répartition genrée de l’encadrement a un impact sur celle de la pratique, il y a encore beaucoup à faire dans ce domaine pour parvenir à la mixité. Dans ce paysage, le sport d’entreprise fait office de bizarrerie. C’est en effet une pratique majoritairement féminine (certains secteurs géographiques ont compté jusqu’à plus 80% de pratiquantes) qui connait une majorité d’hommes dans les compétitions (donc les licences), même si la tendance se réduit, et qui reste majoritairement encadrée par des hommes.
« DES INÉGALITÉS PLUS MARQUÉES QUAND ON PARLE ENTRAÎNEMENT ET COMPÉTITION »
Depuis 18 mois où des formations ont été ouvertes par la FFSE aux professionnel.le.s de l’encadrement sportif pour les préparer à mieux intervenir en entreprise (création d’un certificat de coach d’activités physiques en entreprise – CAPE), 40% des plus de 170 stagiaires formés sont des femmes. Elles sont mêmes 100% parmi les professionnelles du yoga, essentiellement pratiqué par des femmes. De même, le service @workbyffse, qui accompagne les entreprises dans leurs projets sportifs en mobilisant des structures sportives, comptent 54 femmes sur 115 coachs au total, soit la quasi-parité. Ces tendances confirment les statistiques des étudiants STAPS et inquiètent quelque peu pour l’avenir de la compétition féminine. En effet, c’est toujours et encore dans ce domaine que le décalage est fort et la tendance du sport d’entreprise confirme cet état de fait. On peut expliquer en partie cette tendance par la répartition encore très inégalitaire du travail domestique, lié au fait que la pratique compétitive des adultes se déroule principalement sur ces temps de la vie domestique. Cela ne console en rien et ne permet pas de penser que le mouvement va évoluer. Pourtant la mixité des pratiques passe aussi par celle des professionnel.le.s de l’encadrement. Une action volontariste pour féminiser l’ensemble des encadrants reste donc à initier.