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« Documenter l’impact du sport dans le développement de compétences psycho-sociales »

 

Faire des activités physiques et sportives un outil de remobilisation des publics précaires : telle est la vision portée par Emmaüs Solidarité et mise en œuvre dans plusieurs projets, dont un soutenu par l’Agence Nationale du Sport. Entretien avec Bruno Morel, le Directeur Général de l’association créée par l’abbé Pierre.

Propos recueillis par Sylvain LANDA

Bruno MOREL

 

Directeur Général de l’association Emmaüs Solidarité

Vous intervenez auprès des publics les plus fragiles. Comment intégrez-vous les activités physiques et sportives (APS) dans votre quotidien ?

BM : Dans le cadre de sa mission d’accompagnement, Emmaus Solidarité considère les APS comme des leviers d’intégration et d’insertion à part entière. Il va donc s’agir de lever les nombreux freins à la pratique chez des personnes qui, n’ayant plus rien, ont souvent négligé l’entretien de leur corps. D’abord, nous organisons des activités qui n’ont « pas l’air » sportives, mais qui vont faire bouger les participants et créer du lien pour qu’ils aient envie de revenir. Puis d’autres activités sont proposées, en fonction des retours des personnes et au plus près des équipes. Tous les moyens sont bons pour leur faire (re)prendre confiance en eux, en leurs capacités. Car on croit qu’en remobilisant les corps, on peut remobiliser les esprits.

Vous conduisez un projet en ce sens, en partenariat avec Viacti et notre Think tank et avec le soutien de l’Agence nationale du Sport. Vous avez choisi de mesurer l’impact de ce projet. Quels sont les bénéfices de cette démarche ?

BM : Si globalement le sport « fait du bien », ses conséquences s’avèrent particulièrement positives sur la santé des personnes que nous suivons, caractérisées par un état physique fragilisé par des parcours de rue. Nous avons des indicateurs précis, et l’impact est si connu que le sport est désormais un élément de santé publique. En revanche, en ce qui concerne le développement de compétences psycho-sociales, nous devons encore documenter la mécanique et l’impact de la démarche, en identifiant les facteurs de succès avec une méthode qui puisse être réplicable. C’est ainsi que nous pourrons dire aux équipes sociales, aux institutions, aux pouvoirs publics que l’activité physique est un levier puissant, et comment elle intervient dans la remobilisation sur le projet de vie des personnes en difficulté.

 

Comment renforcer les interactions entre les clubs sportifs et les acteurs sociaux ?

BM : Le monde de l’action sociale et les acteurs sportifs se connaissent peu et n’ont pas l’habitude de travailler ensemble alors qu’ils ont des valeurs en commun. Emmaus Solidarité initie désormais des ateliers sportifs, d’abord sous l’angle de la santé et ensuite comme une composante du parcours global des personnes. Mais il est parfois difficile d’aller au-delà, de pratiquer en club quand on ne connait pas les codes, qu’on pense que le sport « c’est pour les autres », qu’on n’a jamais fréquenté un stade, qu’on n’a pas de quoi payer la licence ou l’équipement. Pourtant, il s’agit d’un vrai enjeu de citoyenneté, de vivre ensemble. Dans le cadre d’une démarche partenariale, le premier pas est de faire rencontrer ces deux mondes et de partager notre éthique. De là surgiront des projets pour accompagner les clubs dans l’accueil des publics précaires, ainsi que les financements essentiels pour lever les freins et faciliter, puis développer la pratique.

www.emmaus-solidarite.org

 



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